Molière

 Molière
Portrait anonyme de Molière. D. R.

Janvier 1622 : naissance à Paris de Jean-Baptiste Poquelin, fils d’un marchand tapissier appelé à devenir, en 1631, tapissier ordinaire de la chambre du roi.

Jean-Baptiste perd sa mère à l’âge de dix ans. Son père se remarie l’année suivante.

À douze ans, il entre au collège jésuite de Clermont, l’actuel lycée Louis-le-Grand. À sa sortie du collège, il étudie le droit à Orléans et devient avocat, profession qu’il n’exercera jamais. Il renonce également à la charge de tapissier royal et décide, contre l’avis de son père, de devenir comédien.

En 1643, à vingt et un ans, il fonde donc une troupe qui prend pour nom l’« Illustre Théâtre » : elle compte dix comédiens, six hommes et quatre femmes, dont Madeleine Béjart, sa compagne. Mais la troupe se retrouve vite endettée et, en août 1644, « Molière », le nom de scène et d’auteur qu’il s’est choisi, tâte de la prison : c’est son père qui le tire de ce mauvais pas.

Le jeune homme quitte Paris en 1645 avec ce qu’il reste de l’Illustre Théâtre : lui-même, Madeleine Béjart, ainsi que le frère et la sœur de celle-ci. Tous quatre rejoignent la troupe itinérante du duc d’Épernon, dirigée par l’acteur Charles Dufresne. C’est ainsi que Molière va faire ses classes et sillonner l’ouest et le sud de la France pendant treize ans.

En 1650, Dufresne lui cède la direction de la troupe. Trois ans plus tard, celle-ci joue devant le prince de Conti, qui la prend sous sa protection. La troupe Dufresne-Molière s’appelle désormais « Comédiens de Son Altesse Royale le prince de Conti ». C’est vers 1655 que Molière devient dramaturge avec L’Étourdi ou les Contretemps, inspiré de la comédie italienne, tout comme les farces qu’il produit à la même époque et qui lui valent ses premiers grands succès, notamment La Jalousie du Barbouillé et Le Médecin volant. Mais, en 1656, le prince de Conti, récemment converti à un christianisme rigoureux, retire sa protection à la troupe.

Qu’à cela ne tienne, Molière poursuit son chemin : il écrit et fait jouer Le Dépit amoureux devant « Monsieur », frère du roi, qui lui accorde à son tour sa protection en 1658. Molière a trente-six ans. Il rentre à Paris. Devant le jeune Louis XIV, il donne Nicomède et une farce aujourd'hui perdue, Le Docteur amoureux. Le roi est conquis : la troupe obtient le droit de partager avec les Comédiens-Italiens de Scaramouche la salle de théâtre du Petit-Bourbon. Molière dirige donc désormais la « Troupe de Monsieur ».

En 1659, il fait représenter Les Précieuses ridicules : c’est un triomphe. Suit, en 1660, Sganarelle ou le Cocu imaginaire : nouveau triomphe. La troupe déménage dans la salle du Palais-Royal. C’est là qu’elle donne L’École des maris, qui séduit tant Nicolas Fouquet, surintendant des Finances, qu’il commande à Molière une pièce destinée à être représentée devant le roi et sa Cour dans son somptueux château de Vaux-le-Vicomte. À cette occasion, le dramaturge invente un genre nouveau, la comédie-ballet, et, en quinze jours, crée Les Fâcheux. Sa carrière est définitivement lancée.

À quarante ans, en 1662, il épouse Armande Béjart, dont on ignore encore si elle était la fille ou la sœur de Madeleine. Toujours est-il qu’elle a vingt ans et qu’il en est très épris. C’est, pour Molière, le temps de la maturité : avec L’École des femmes, qui connaît un immense succès la même année, il délaisse la farce et soulève des questions novatrices sur l’institution du mariage ou l’éducation des filles, qui lui valent une longue polémique alimentée par les tenants de la morale traditionnelle comme par ses concurrents. Il leur répond par le sarcasme dans La Critique de L’École des femmes et dans L’Impromptu de Versailles en 1663. En 1664 suivent Le Mariage forcé et La Princesse d’Élide, le calme avant la tempête du Tartuffe. Le personnage du faux dévot heurte les catholiques les plus austères. Louis XIV cède aux instances de l’archevêque de Paris : la pièce est interdite. Elle le restera cinq ans. En 1665, Dom Juan ou le Festin de Pierre crée un nouveau scandale : on accuse Molière de mettre en scène le libertinage et l’impiété. La pièce ne sera jouée que deux semaines. Mais le roi fait taire les critiques en prenant la troupe sous sa protection : la « Troupe de Monsieur » devient la « Troupe du Roi au Palais-Royal ».

Et c’est en tant que telle qu’elle donne la comédie-ballet de L’Amour médecin (1665), Le Misanthrope, Le Médecin malgré lui (1666), Amphitryon, Georges Dandin, L’Avare (1668), Monsieur de Pourceaugnac (1669), Le Bourgeois gentilhomme (1670), La Comtesse d’Escarbagnas, Les Fourberies de Scapin (1671), Les Femmes savantes (1672) et, enfin, en 1673, Le Malade imaginaire.

Le 17 février 1673, au sortir de la quatrième représentation du Malade imaginaire, Molière meurt d’une pneumonie à l’âge de cinquante et un ans. N’ayant pas abjuré la profession de comédien, qui vaut excommunication, il ne peut prétendre à des obsèques chrétiennes. Armande Béjart, sa femme, va supplier Louis XIV : on lui accorde une inhumation nocturne et sans aucune cérémonie…